Les moyens d'action d'Euratom

AuthorJ. Gijssels
DOI10.1177/002085236102700202
Date01 June 1961
Published date01 June 1961
Subject MatterArticles
Les
moyens
d’action
d’Euratom
par
J.
GIJSSELS,
Conseiller
juridique
de
la
Commission
d’Euratom.
CDU
35.072
+
35.077 :
(621.039 :
061.1)
(4)
INTRODUCTION
Les
sciences
et
les
techniques
nucliaires
se
sont
diveloppies
considirablement
dans
les
vingt
dernihres
annies.
Elles
sont
essentielle-
ment
le
fait
des
savants
et
des
ingenieurs
qui
ont
à
les
mettre
en
ceuvre.
Elles
conservent
vis-d-vis
du
public
zvrc
aspect
quelque
peu
itrange.
Cependant,
l’ application
de
ces
tech-
niques
nouvelles,
par
l’ampleur
des
moyens
f inanciers,
des
rialisations
industrieues
et
des
iquipes
d’hommes
qu’elle
exige
ainsi
que
par
les
pricautions
qu’il
convient
de
prendre
pour
la
divelopper
sainement,
pose
aux
spécialis-
tes
des
diverses
disciplines
-
juridique,
ico-
nomique,
sociale,
administrative,
etc.
-
der
p1’oblèmes
qu’ils
s’ef f orcent
de
1’ésoudre.
Ils
peuvent
parfois
itre
eff1’ayés
de
la
com-
plexiti
d’une
matiere
qui
requiert
certes
une
certaine
initiative.
Cette
crainte
devant
la
valeur
des
études
d£jl
publiées
n’apparait
pas
tres
fondée.
11
reste
cependant
que
les
promoteurs
de
L’energie
atomique
se
doivent
d’apporter,
dans
toute
la
measure
de
leurs
moyens,
leur
contribution
aux
recherches
et
aux
reflexions
de
ces
spicialistes.
L’etude
publiée
ci-après
sous
la
signature
d’un
conseiller
juridique
de
la
Commission
d’Euratom,
M.
Gijssels,
peut
contribuer
à
eclairer
les
spécialisteö
des
sciences
adminis-
tratives
sur
les
moyens
d’action
et
les
mica-
nismes
institutionnels
utilises
par
Euratom
en
vue
de
rialiser
les
objectifs
qui
lui
sont
assignis.
Elle
pourra
aider
aussi
à
digager
des
élé-
ments
de
riponse
d
des
problèmes
qui
se
posent
dans
d’autres
domaines
ou
des
faits
nouveaux
appellent
de
nouvelles
modalites
d’ad~»~i.ni,rtration.
E.
HIRSCH,
Président
da
la
Commission
de
la
Communauté
Europienne
de
1 Energie
A iomoo
(Euratom).
Constatant
les
immenses
possibilites
de
1’6nergle
atomique,
on
~s’est
plu a
en
souligner
le
caract6re
r6volutionnaire.
On
aurait
pu
dire
avec
autant
de
raison
que
’la
revolution
atomique
-
nous
entendons
par
la
le
profound
bouleversement
de
1’ordre
social
et
des
struc-
tures
economiques
-
a
pu
etre
evitee.
Le
m6rite
en
revient
tout
particulierement
aux
theoriciens
et
praticiens
des
sciences
politi-
ques
et
administratives
qui,
sollicites
par
l’inquie’tude
de
l’opinion,
ont
su
promptement
suggerer
les
mesures
propres
a
intégrer
cette
redoutable
puissance
dans
la
vie
de
la
societe.
L’histoire
nous
montre
trop
d’exemples
de
desordres
et
de
revolutions
qui
trouvent
leurs
causes
essentielles
dans
l’inadaptation
de
l’organisation
sociale
aux
phenomenes
econo-
miques
et
techniques
qui
sont
en
vole
de
mo-
difier
la
physionomie
d’une
civilization.
C’est
que
le
droit
est
inefficace
et
manque
son
ob-
jet
s’il
est
en
retard
sur
le
reel.
La
tache
specifique
des
responsables
de
la
gestion
publique
est
d’etre
constamment
attentifs
a
1’evolution
des
choses
et
de
tenter
de
limiter
au
minimum
le
décalage
entre
le
fait
et
le
droit.
Il
s’agit
la
d’un
defi
tres
diffici’le
a
re-
lever
parce
que
les
faits
ont
tendance a
s’6chapper
de
1’empire
du
droit
au
fur
et
a
mesure
que
celui-ci
les
organise.
Dans
le
domaine
de
1’6nergie
atomique,
ce
defi
semble
avoir
ete relev6
avec
succes :
a
peine
la
physique
avait-elle
reussi
a
maitriser
la
fission
de
’1’atome
que
deja
les
sciences
ad-
ministratives
reussissaient
a
en
maitriser
les
cons6quences
sociales
-
en
neutra!isant
les
effets
pr6judiciables
de
l’6nergie
atomique,
certes,
mais
bien
plus
encore
en
stimulant
l’utilisation
d’une
force
qui,
malgr6
1’horreur
par
laquefle
elle
s’est
révélée,
s’imposait
n6an-
moins
comme
un
apport
précieux
au
progr&.
L’ensemble
des
mesures
organiques
et
des
regles
d’action
qui
ont
ete
e’labor6es
a
cet
effet
s’expriment
et
trouvent
leur
forme
dans
le
droit
atomique.
Ce
droit
s’est
développé
dans
chacun
des
120
pays
qui
desiraient
s’engager
dans
la
voie
nucleaire,
a
partir
de
connaissances
eprouvees
et
d’experiences
acquises.
II
n’est
donc
ni
un
droit
entierement
autonome,
ni
un
droit
en-
tierement
nouveau.
Si
l’ceuvre
est
originale
dans
1’ensemble,
son
origina!lite’
consiste
essen-
tiellement
dans
la
synthese
de
regles
de
com-
pet6nce
et
d’organisation,
de
pouvoirs
d’ac-
tion
et
de
garanties
empruntees
aux
diverses
branches
classiques
du
droit.
Il
ne
rompt
donc
pars
avec
la
tradition
nationale,
mais
y
trou-
ve
au
contraire
ses
racines.
Ses
solutions
ine-
dites
elles-mcmes
ne
heurtent
pas
la
con-
science
juridique
parce
qu’el’les
s’inscrivent
dans
revolution
des
doctrines
contemporaines
d’economie
politique
et
die
droit
public.
C’est
d’ailleurs
ainsi
que
l’utilisation
de
1’energie
atomique
a
pu
etre
assimilee
dans
nos
societes
sans
modifier
fondamentalement
leur
aspect.
Ses
attaches
avec
le
droit
de
chacun
des
Etats
dans
lesquels
il
s’est
developpe
n’ont
cependant
pas
cree
une
tres
grande
disparite
de
syst6mes.
Des
facteurs
d’harmonisation
ont,
en
effet,
profond6ment
influence
la
for-
mation
du
droit
atomique.
En
premier
lieu,
les
problemes atomiques
sont
essentiellement
les
memes
partout;
les
recherches
devaient
donc
logiquement
s’orien-
ter
vers
des
solutions
semb’lab~les.
Ensuite,
les
Etats
qui
ont
ete
’les
premiers
a
developper
un
programme
atomique
ont
exerce
une
influence
considerable
sur
ceux
qui
y
ont
accede
plus
tard :
avec
les
connaissances
techniques
et
les
matieres
nucleaires
qu’ils
obtenaient des
pre-
curseurs,
ils
ont
adopt6,
parfois
d’ailleurs
en
vertu
d’un
engagement
formel,
des regles
de
droit
en
vigueur
chez
ces
derniers.
Deja
par
lie
jeu
de
ces
facteurs,
le
droit
ato-
mique
presenterait
dans
le
monde
un
aspect
relativement
coherent.
Mais,
en
plus,
it
tend
tres
nettement a
s’interna~tionaliser.
Si
les
problemes
sont
generalement
les
memes,
ils
sont
aussi
souvent
communs.
Les
Etats
cher-
chent
a
se
concerted
en
vue
de
trouver
des
solutions
communes,
conscients
de
leur
rela-
tive
faiblesse
par
rapport
aux
exigences
du
d6veloppement
atomique
et
de
’la
precarite
de
leurs
moyens
de
protection.
Les
tendances
communes
que
revele
une
etude
tres
panoramique
des
droits
nucleaires
s’expriment
dans :
~- un
renforcement
des
moyens
d’action
de
caraoctère
pub’lic
et
la
creation
d’institu-
tions
specialisees
capables
de
les
mettre
en
œuvre;
- 1’etroite
association
de
tous
les
milieux
in-
teresses,
tant
publics
que
priv6s;
-
la
volonte
d’une
cooperation
par-dela
les
f rontieres.
Expression
de
1’esprit
du
temps,
Euratom
puise
dans
ces
trois
tendances
ses
caracteris-
tiques
fondamentales.
a)
Inversons
1’ordre
pour
des
raisons
di-
dactiques
et
examinons
d’abord
celles
qui
est
la
plus
apparente :
sa
qualite
d’organisation
internationale.
Instituee
par
un
traite
inter-
etatique,
la
Communaute
Europeenne
de
1’Energie
Atomique
est
apte a
exercer
d’une
fagon
permanente
use
action
propre,
distinc-
te
de
celle
des
six
Etats
qui
l’ont
creee.
E’lle
est
dotee
de
la
personn£lit[
juridique
de
droit
international
et
peut, ~
ce
titre,
s’engager
vis-
a-vis
des
Etats
tiers
et
dens
organisations
in-
ternat-ionales
par
la
conclusion
d’accords
in-
ternationaux,
et
exercer
le
droit
de
legation
actif
et
passif.
b)
Mais
les
attributions
d’une
organisation
internationale
de
type
classiques
n’etaient
pas
en
elles-memes
suffisantes
pour
repondre
a
1’ampleur
de
1’effort
que
les
six
Etats
avaient
decide
de
fournir
en
commun.
Seule
une
or-
ganisation
investie,
en
propre,
de
pouvoirs
d’autorite
et
habilitée à
entreprendre
elle-
meme
’1’action
indispensable
pour
completer
les
realisations
des
pays
participants,
etait
en
mesure
d’assumer
les
nombreuses
taches
li6es
au
developpement
de
1’energie
atomique
en
Europe.
Euratom
revet
ainsi,
par
la
nature
de
ses
pouvoirs
et
l’organisation
des
institutions
qui
les
exercent,
la
forme
constitutionnelle
et
tes
caracteristiques
d’une
organisation
europ6enne
de
type
federal,
au
meme
titre
que
la
Com-
munaute
Europeenne
du
Charbon
et
de
1’A-
cier
et
la
Communauté
Economique
Euro-
p6enne.
Congue
lors
de
la
relance
europeenne
de
1954,
elle
se
situe
dans
1’histoire
au
point
de
rencontre
de
deux
impulsions
fondamen-
tales
des
.dernières
décades :
1’impulsion
ato-
mique
et
impulsion
europeenne.
Ses
pouvoirs
sont
des
pouvoirs
souverains
que
les
Etats
membres
lui
ont
confere
dans
la
mesure
necessaire
a
la
realisation
des
ob-
jectifs
fixes
dans
le
Traite.
Ils
sont
des
lors
limites
par
leur
objet,
mais
tres
larges
par
leur
nature.
Ils
relevent
du
legislatif,
de
1’ex6-
cutif
et
du
judiciaire.
Les
organes
qui
les
exercent
presentent
donc
ensemble
les
attributs
classiques
d’une
organisation
étatique :
ils
agissent
directe-
ment,
sans
intervention
des
autorites
natio-
nales,
dans
un
ordre
juridique
interne
propre
a
la
Communaute
en
arrftant
des
actes
con-
stitutifs
de
droits
et
d’obligations;
les
regle-

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